La question anorexique en France (1873-1937). Elsie Megret

Mariana Scarfone a co-encadrée la thèse de doctorat en sociologie et anthropologie historique d'Elsie Megret (LiNCS), dirigée par Nicoletta Diasio (LinCS).

 

2 juillet 2025
13h30 16h
amphithéâtre du Collège doctoral européen de l'université de Strasbourg

La question anorexique en France (1873-1937). 
Étude de la production des « seuils diagnostiques » d’une catégorie médicale d’âge et de genre.

Le jury est composé de : 

  • Hervé Guillemain, Professeur des Universités, Université du Mans (rapporteur)
  • Ingrid Voléry, Professeure des Universités, Université de Lorraine (rapportrice)
  • Heinrich Hartmann, Professeur des Universités, Helmut Schmidt University (examinateur)
  • Anne Lhuissier, Directrice de recherche, INRAE (examinatrice)
  • Perig Pitrou, Directeur de recherche, CNRS (examinateur)
  • Jeanne Teboul, Maîtresse de conférences, Université de Strasbourg (examinatrice)
  • Nicoletta Diasio, Professeure des Universités, Université de Strasbourg (directrice)
  • Marianna Scarfone, Maîtresse de conférences, Université de Strasbourg (co-encadrante)  

Résumé
Cette étude problématise la production des « seuils diagnostiques » de la catégorie médicale d’anorexie en France, entre 1873 et 1937. En s’appuyant sur une enquête de sociologie et d’anthropologie historique menée à partir d’un terrain documentaire (archives médicales et administratives, publications scientifiques et médicales, iconographies), la thèse retrace les façons dont la « question anorexique » a été « travaillée » par et au sein de divers savoirs relatifs aux processus vitaux de développement. L’étude souligne d’abord que dès les années 1870, les aliénistes, psychiatres et neurologues identifient l’anorexie hystérique, mentale et nerveuse à partir de « seuils esthétiques de genre » et de « seuils de sexualisation ». Elle montre ensuite qu’au tournant du XXe siècle, les connaissances psychophysiologiques et pédiatriques axées sur la nutrition et la maturation psycho-sexuelle participent à diagnostiquer la pathologie à partir de « seuils métaboliques » et de « seuils de croissance », rendant ainsi observable l’anorexie chez les nourrissons et les enfants. Enfin, l’étude suggère que les réponses thérapeutiques apportées à l’anorexie par la psychologie expérimentale et l’hygiène mentale contribuent à stabiliser la catégorie médicale autour de « seuils de rendement » d’âge, de genre et de classe, classifiant ainsi durablement la maladie parmi les anormalités de l’enfance et les troubles nerveux considérés comme curables. Au fil de l’analyse, ce travail suggère que la catégorie d’anorexie n’est pas produite à partir d’âges chronologiques stables, mais à partir de pratiques matérielles d’objectivation, de mesure et de visibilisation de phénomènes vitaux corporels, biochimiques ou physiologiques. La thèse met également en avant les tensions classificatoires qui façonnent la catégorie, à la croisée d’« interventions médicales » de régulation du développement et d’opérations de standardisation des âges de la vie.

Mots-clés : Anorexie, âges de la vie, développement, genre, sexualité, processus vitaux, temporalités corporelles, histoire des sciences et de la médecine, matérialités scientifiques

Université de Strasbourg
Centre national de la recherche scientifique | CNRS